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Claude Mourthé

À l'occasion de la parution de «Shakespeare comme il vous plaira», dans la collection Folio Bilingue, entretien avec l'éditeur Claude Mourthé.



1) Shakespeare est encore peu étudié au collège du fait de la difficulté de la langue. Pensez vous que cette édition bilingue peut en favoriser l’accès ?

Bien entendu. Pas besoin d’avoir un dictionnaire sous la main. De plus, grâce au travail d’une multitude d’universitaires, les textes originaux ont été modernisés à partir du folio incontestable de 1623, dû à deux proches collaborateurs de Shakespeare : Heminges et Condell, et les notes de lecture abondent.

2) Pouvez-vous expliquer comment est construite cette anthologie ? C’est le deuxième tome de «Scènes célèbres» de Shakespeare qui paraît. Quels « morceaux de bravoure » de l’œuvre avez-vous privilégiés ici? Comment avez-vous choisi les extraits ?

L’idée du premier volume était de mettre en avant les grands monologues en faisant appel aux auteurs du fonds Gallimard (Gide, Supervielle, Maeterlinck etc.). Dans le second, la directrice de collection et moi avons choisi de privilégier les situations et les scènes de comédie, surtout celles qui sont le moins connues, telle la scène entre Catherine de France et sa suivante, dans Henry V, ou le repas dans Timon d’Athènes, avec des traducteurs plus récents, tels Jean-Michel Déprats et Line Cottegnies.

3) Un des nouveaux thèmes d’étude dans les programmes du collège en 4e est «Dire l’amour ou l’expression du lyrisme». Quelle en serait la scène représentative dans ces recueils ?

Évidemment celle du balcon entre Roméo et Juliette (acte II, scène 2).

4) Lorsqu’on lit certaines scènes d’amour de Shakespeare, peut-on dire qu’il est précurseur du courant romantique ?

Certes : les Hugo, père et fils, ne s’y sont pas trompés. Victor Hugo est l’auteur d’une monumentale biographie, tandis que son fils François-Victor a traduit l’intégrale de l’œuvre, qui fait encore référence aujourd’hui.

5) Dans ses comédies, Shakespeare fait souvent appel au monde du merveilleux. Comment peut-on faire entrer des élèves dans cet univers féérique ?

Rien de plus facile pour eux. N’y sont-ils pas déjà habitués avec les contes pour enfants, dont ils ont gardé le souvenir ineffaçable, les BD et ce que leur propose fréquemment le cinéma ?

6) Certains thèmes se retrouveront plus tard chez nos auteurs français du 17e siècle, avec le goût du travestissement ou de la ruse triomphante de la jeunesse sur l’autorité des pères. Les auteurs qui traversent le temps sont-ils majoritairement préoccupés par la jeunesse ?

C’est un de leurs sujets de prédilection, mais il y a aussi une réflexion intéressante sur la vieillesse, par exemple dans Le Roi Lear.

7) Qu’est ce qui fait encore la modernité de Shakespeare aujourd’hui ?

Sans nul doute son universalité, et sa façon d’aborder, à travers la destinée des rois ou celle du commun des mortels, tous les problèmes de la condition humaine, ceux qui nourrissent la philosophie de tous les temps.

8) Que diriez-vous aux collégiens pour les aider à comprendre ces extraits de Shakespeare ?

De se reporter par la lecture aux originaux, sans crainte ni a priori et, s’ils le peuvent, aller voir le plus de pièces possible. Shakespeare est inépuisable.

Propos recueillis par Lucile Abada