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Dossiers thématiques

Albert Camus

Camus ou l’artiste protéiforme

«Créer, c’est ainsi donner une forme à son destin.» Le Mythe de Sisyphe Albert Camus

La carrière d’Albert Camus est remarquable par sa grande diversité et par le chemin parcouru, de l’enfant des quartiers pauvres d’Alger au prix Nobel de Littérature à Stockholm. L'auteur a exploré l’univers de l’écriture à travers différentes approches qui ont donné naissance à une œuvre d’une grande richesse.

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L’expérience journalistique

Camus

Albert Camus débute sa carrière professionnelle en tant que journaliste à Alger Républicain. Il rédige alors différents articles sur la situation des Algériens, notamment sur les conditions de vie des musulmans en Kabylie, qui suscitent une vive polémique. Cette première approche de l’écriture permet à Camus de découvrir l’univers du journalisme.
Ses articles fort critiqués, Camus est contraint de quitter le journal algérien. Mais sa carrière journalistique se poursuit puisqu’il participe pendant la Seconde Guerre mondiale au journal clandestin Combat.
C’est ensuite dans les pages de L’Express que l’on retrouve la plume de Camus, devenu éditorialiste à l’hebdomadaire.
La lecture des articles rédigés par l’auteur offre un éclairage intéressant sur la pensée de Camus et sur sa perception de la situation politique du moment. Les trois tomes d’Actuelles reprennent différents articles d’Albert Camus, notamment sur la question algérienne. On y retrouve les chroniques de l’auteur au fil des ans, de 1939 à 1958.

Pour bien saisir l’ampleur de l’expérience journalistique de Camus, il faut également se reporter aux Fragments d’un combat qui sont composés de différents articles de presse écrits entre 1938 et 1940, ainsi qu’à Camus à Combat ou encore Albert Camus éditorialiste à L’Express.

L’homme de théâtre

Dramaturge, comédien, metteur en scène, directeur de théâtre, Albert Camus aborde cet art à travers toutes ces facettes. Il fonde, avec plusieurs amis, en 1936, le Théâtre du Travail (celui-ci devient en 1937 le Théâtre de l’Équipe). Camus joue dans certaines pièces avec la troupe de Radio-Alger. Dramaturge, il rédige Caligula dès 1939, œuvre qui viendra former le cycle de l’absurde avec notamment Le Malentendu, autre pièce de théâtre écrite en 1943. Des crimes de Caligula aux meurtres perpétrés par Martha et sa mère, c’est l’absurdité de la condition humaine que ces pièces pointent du doigt : «Les hommes meurent et ils ne sont pas heureux».
Camus poursuit également son activité théâtrale et incarne le personnage de Garcin dans Huis clos de Sartre. Le dramaturge n’arrête pas pour autant son travail de création et donne ainsi naissance à deux autres pièces, L’État de siège et Les Justes. Ces deux œuvres ont une dimension plus politique car elles défendent un idéal de liberté et dénoncent toute forme de despotisme : «La liberté est un bagne aussi longtemps qu’un seul homme est asservi sur la terre».
En 1956, Camus revient vers le théâtre avec une adaptation de Requiem pour une nonne de Faulkner, puis en 1959 du roman de Dostoïevski, Les Possédés.

Le tournant philosophique

L’Envers et l’Endroit est la première œuvre d’Albert Camus a être publiée. Dans ce recueil d’œuvres de jeunesse, on trouve une série de courts essais dans lesquels l’écrivain mêle des bribes de souvenirs à des réflexions plus philosophiques. Ce premier ouvrage a une dimension importante car il aborde déjà les thèmes chers à Camus, et l’auteur reconnaîtra plus tard que ce recueil éclaire l’intégralité de son œuvre.
Albert Camus poursuit sa réflexion sur le monde qui l’entoure dans Noces, courts récits à tonalité lyrique dans lesquels il exprime son questionnement sur la condition humaine et sur la quête du bonheur. En 1942, Le Mythe de Sisyphe est publié. Cet essai vient s’inscrire dans le cycle de l’absurde (avec L’Étranger, Caligula et Le Malentendu). Camus s’inspire du mythe grec de Sisyphe, condamné par les dieux à pousser en haut d’une colline un rocher qui redescend sans cesse, pour illustrer l’absurdité de la condition humaine.
Mais au-delà de cette absurdité, Camus considère qu’« il faut imaginer Sisyphe heureux », c’est-à-dire que Sisyphe trouve un apaisement dans cette conscience de son existence. Dans le prolongement de cet essai, l’auteur rédige L’Homme révolté (1951). «Accepter l’absurdité de ce qui nous entoure est une étape nécessaire : cela ne doit pas devenir une impasse. Elle suscite une révolte qui peut devenir féconde», mais cette révolte est mal perçue par les contemporains de Camus et engendre une discorde notamment avec Sartre et Breton.

«Le romancier philosophe»

C’est ainsi que se perçoit Albert Camus, dans cette complémentarité entre la littérature et la philosophie, et cette oscillation transparaît dans ses différents récits. L’auteur initie son écriture romanesque avec la rédaction de La Mort heureuse, qu’il abandonne par la suite et qui ne sera publiée qu’à titre posthume. Dans cette œuvre, le personnage principal, Meursault, recherche le bonheur à tout prix, même celui du crime. Alors qu’il laisse de côté La Mort heureuse, Camus prend une série de notes pour préparer son nouveau projet narratif, non sans lien avec son premier roman. Le personnage de Meursault naît avec la publication de L’Étranger en 1942.
Ce roman inaugure le cycle de l’absurde et l’auteur aborde à travers le récit sa réflexion sur l’absurdité de la condition humaine. Avec la publication de La Peste en 1947, Camus entame un nouveau cycle, celui de la révolte (que l’on retrouve dans L’État de siège, Les Justes ou encore L’Homme révolté), incarnée par la lutte acharnée du docteur Rieux contre ce fléau qui décime la population d’Oran.
À ce cri de révolte succèdera le discours sombre de Clamence dans La Chute (1956). Dans sa confession, ce personnage de «juge pénitent» offre une vision bien plus pessimiste de l’humanité, au-delà de toute absurdité ou de toute révolte.
En 1960, Albert Camus décède dans un accident de voiture. À l’intérieur du véhicule, on retrouve le manuscrit inachevé du Premier Homme qui sera publié à titre posthume. À travers le parcours du personnage principal, c’est également la vie d’Albert Camus qui transparaît, un récit qui tend vers l’autobiographie, avec le souvenir de l’Algérie de son enfance.

Exercices

Écriture d’invention

Sujet 1

Vous êtes journaliste et vous devez rédiger un article de presse traitant de l’oppression d’une population par un pouvoir totalitaire. Vous pouvez inventer un pays et un régime.

Votre article devra faire apparaître une tonalité polémique en dénonçant les méthodes du régime en place.

Cet exercice a pour but de sensibiliser les élèves à la tonalité ainsi qu’à la visée d’un texte. Ils devront également respecter la forme, c’est-à-dire l’article de presse. On attend de leur part une description du régime en place et du sort réservé à la population.
Il leur faudra parvenir à exprimer l’indignation et le sentiment de révolte du journaliste, notamment à travers l’emploi d’un lexique approprié.

Travail préalable : lecture d’extraits d’Actuelles, Albert Camus éditorialiste à L’Express ou Camus à Combat.

Sujet 2

Vous êtes journaliste et vous avez assisté à une représentation de Les Justes d’Albert Camus. Vous rédigez une chronique dans laquelle vous exprimez vos impressions sur la pièce et sur sa mise en scène.

Cet exercice doit amener les élèves à mettre en relation le texte théâtral et sa mise en scène. La chronique fera apparaître une structure logique avec une composition en différents paragraphes. Les élèves pourront approuver ou critiquer certains choix du metteur en scène. Ils devront utiliser le lexique propre à l’univers théâtral.

Travail préalable : lecture de Les Justes et assister à la représentation au Théâtre de la Colline.

Dissertation

Sujet 1

Dans son œuvre intitulée Mauprat (1830), George Sand préconise comme méthode de formation «l’étude des lettres, qui n’est autre que l’étude des hommes». En quoi cette affirmation de George Sand éclaire-t-elle l’œuvre d’Albert Camus ?

Sujet 2

Dans quelle mesure Albert Camus peut-il être considéré comme un écrivain engagé ?

Ces deux sujets de dissertation ont pour but d’amener les élèves à rédiger un développement argumenté et organisé en différents paragraphes. Ils devront avoir une perception des différentes facettes de l’œuvre de Camus et réfléchir à son évolution.