2010 - Paris - Rouge: ronde, oblongue, verte, safranée, noire, zébrée, elle s'épanouit arlequine dans le semis d'un potager où elle reçoit les rouges baisers d'un - jardinier qui lui demande en secret : «Me direz-vous un jour la saveur de vos lèvres? Me direz-vous un jour le goût de vos baisers?»
1979 – La Rochelle – Salade: du plus loin qu’il m’en souvienne, ma première expérience tomatophagique fut une salade, la toute simple, celle aux quartiers vinaigrettés baignant dans leur jus pépineux. Au fil de l’enfance, elle connut des variantes selon les disponibilités du panier à alliacées, le bon vouloir du carré de simples assoiffés et l’inspiration de mon beau-père. Elle et lui ne cédèrent que tardivement à l’appel de la Botte et à la nouvelle sacro-sainte trinité: tomate-mozzarella-basilic. Sa mutation la plus radicale fut de voir la tomate subir une épuration de ses attributs sous prétexte que ces derniers donnaient des gaz à ma mère. Ainsi ne mange-t-on plus chez mes parents qu’une salade de tomates pelées, épépinées, asexuées. Des années plus tard, en hommage à cette cuisine obligée, de décrets, conditionnée par des guerres intestines, j’offris à mon beau-père un livre, Les plats qui font péter.