Un seul coup de crayon sur une feuille de papier, et tout l'espace s'ébranle : c'est la force du premier trait sur la toile vierge, c'est l'alif à l'origine de l'alphabet, c'est l'écriture se déployant dans les méandres de l'encre. Projection en même temps qu'inscription de la lumière sur une surface, de préférence plane et claire, l'ombre est la trace du vivant sur terre. À peine l'a-t-on cernée d'un contour que l'absent qui s'y est réfugié reprend forme, retrouve son identité, et que la mémoire se met à agir. Dessins, estampes, photographies sont des moyens de retenir – chacun à leur manière, et chacun à leur rythme – ces brèves manifestations de l'existant.
Florian Rodari s'interroge dans ces pages sur la volontaire et contraignante limitation au couple noir/blanc, dualité splendide de l'encre et du papier en vue d'obtenir – hors tout recours à la couleur – des images capables de satisfaire pleinement le regard. Sont réunis dans cet ouvrage un certain nombre de ses essais consacrés à des artistes aussi divers que Rembrandt, Victor Hugo, Henri Michaux, Jacques Henri Lartigue, Balthasar Burkhard ou Georg Baselilz.