8 février 1962 : en réaction à l'offensive terroriste de l'OAS, une manifestation se heurte à la violence voulue de l'État. À la station de métro Charonne, devant les portes ouvertes, on relèvera neuf morts sous les coups de la police.
Au-delà de la reconstitution des faits avérés, Alain Dewerpe pose des problèmes historiques d'un ordre plus général dans un livre qui servira de modèle à d'autres.
Il traite d'abord de la violence d'État en démocratie représentative : organisé ou non, planifié ou non, le meurtre politique fait partie de l'outillage des actes d'État ; il a, même obscures ou contournées, ses raisons et son efficace.
Il pose la question du scandale civique : à quoi l'État a-t-il droit ? L'affaire pourrait se dénouer par la mise en place d'un récit moralement et politiquement fondé et partagé. Or, à travers une version d'État mensongère jusqu'à nos jours, ce règlement est demeuré historiquement instable.
Il ouvre également sur les usages politiques et sociaux de la mort : la manifestation-obsèques du 13 février fut un des plus considérables rassemblements dans la France du XX<sup>e</sup> siècle. Comment comprendre alors que cette mémoire du massacre, faite de commémorations mais aussi de censures, de souvenirs mais aussi d'oublis, s'est effritée devant d'autres événements traumatisants de la guerre d'Algérie ?
Faut-il l'écrire ? Cet ouvrage est unique en son genre.