Né en 1929 à Kaufbeuren en Bavière, Hans Magnus Enzensberger occupe sur la scène poétique allemande une place très singulière : poète engagé s'il en est, anti-conformiste dénonçant tous les pouvoirs, il a été tout à la fois applaudi, redouté, insulté, et n'a laissé aucun critique indifférent. Il a d'ailleurs inventé un genre explicitement «acide» et désigné ses textes comme «poèmes déplaisants». Ceux-ci forment la meilleure part de sa Défense des loups et s'en prennent aux agneaux qui aiment tant être dévorés, qui font preuve d'une répugnante paresse d'esprit et qui préfèrent que les loups pensent et agissent en leur nom. Lucidité, ironie persiflante, démystification sont les armes habituelles d'Enzensberger qui s'attache à saper les puissances établies sur le mensonge, le renoncement et, selon sa formule, «la veulerie des mous».
En contrepoint à ces poèmes qui témoignent d'une vision amère du destin de l'humanité, son Mausolée, aussi tonique que déconcertant, célèbre les faits et gestes des personnages phares qui ont, aux yeux de l'auteur, le plus compté en Occident. De Gutenberg à Che Guevara, trente-sept portraits inattendus, pleins de perspicacité, de mordant, d'émotion : une généalogie progressiste qui échappe à toute histoire officielle.