«On associe souvent Fernando Pessoa aux créateurs qui ont, dans la première moitié du XX<sup>e</sup> siècle, enregistré les fractures et les fragmentations du moi, en mettant en scène dans leur œuvre la multiplicité intérieure. On le situe ainsi à côté de Pirandello, dont il rappelle la virtuosité kaléidoscopique dans l'expression du vertige mental ; de Kafka, avec qui il a en commun le don de plonger dans le vide de l'être non sans humour mélancolique ; de Joyce, pour l'habileté et la subtilité de ses constructions littéraires : de Schnitzler, pour l'acuité et l'acidité de ses analyses psychiques ; de Larbaud, et de son goût pour les masques et la polyglossie créatrice ; de Valéry, tout au moins le Valéry des circonvolutions complexes explorées dans Monsieur Teste, des dissolutions mentales provenant de Mon Faust, de la fragmentation de la pensée consignée dans les Carnets : ou encore d'Albert-Birot, dont les Poèmes à l'autre moi sont représentatifs, quoique méconnus, de ce qu'on peut appeler, contemporaine d'une crise de civilisation, la crise du moi.»
Patrick Quillier.